À l’occasion de la Journée mondiale des espèces menacées, célébrée le 11 mai, les projecteurs se braquent sur les figures emblématiques de cette crise écologique sans précédent. Parmi elles, le gorille des montagnes, joyau fragile du patrimoine naturel mondial, incarne à la fois l’espoir et l’urgence. Présent uniquement dans les forêts de la région des Grands lacs africains à la croisée de la RDC, du Rwanda et de l’Ouganda ce grand primate lutte pour sa survie dans un environnement marqué par les pressions humaines et les conflits armés.
Selon la liste rouge 2025 de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN), l’instrument de référence mondial pour suivre l’état de conservation des espèces 47 187 espèces sur les 169 420 évaluées sont classées comme menacées. Cela signifie qu’un mammifère sur quatre, un oiseau sur huit, un amphibien sur trois et un arbre sur trois est en danger d’extinction. Ces chiffres, alarmants, illustrent l’effondrement silencieux mais massif de la biodiversité.
Le gorille des montagnes : un symbole à sauver
Malgré une légère remontée des effectifs grâce à des efforts de conservation exemplaires, le gorille des montagnes reste classé en danger par l’UICN. Son habitat naturel le parc national de Virunga subit de plein fouet la pression humaine, entre déforestation, braconnage et conflits militaires dans l’Est de la RDC.
Ce parc, l’un des plus anciens d’Afrique, est à la fois un sanctuaire écologique et un champ de bataille. Les groupes armés qui y sévissent menacent autant les populations locales que les gardes forestiers chargés de protéger la faune. Depuis 1996, plus de 200 écogardes y ont perdu la vie, illustrant la dangerosité du terrain. Cette instabilité compromet la mise en œuvre des programmes de conservation à long terme, pourtant vitaux pour la survie de ces primates.
C’est quoi la liste rouge de l’UICN exactement ?
Il s’agit de l’inventaire mondial le plus complet sur l’état de conservation des espèces animales et végétales. Ce système de classement, né d’années de recherche et de collaboration entre experts, s’appuie sur des critères scientifiques rigoureux pour évaluer le niveau de menace pesant sur chaque espèce. Il permet non seulement de documenter le recul de la biodiversité, mais surtout d’orienter les actions prioritaires en matière de protection de la nature.
Grâce à cette base de données, nous savons par exemple : 41 % des amphibiens, 12 % des oiseaux, 27 % des mammifères, 37 % des requins et raies, 44 % des coraux constructeurs de récifs,38 % des arbres qui sont actuellement en danger.
Et ce n’est pas tout. La liste rouge classe les espèces dans différentes catégories : de « Préoccupation mineure » (LC) à « Éteinte » (EX), en passant par « En danger critique d’extinction » (CR), comme c’est le cas de nombreuses espèces emblématiques. Ces données permettent aussi de dresser une carte des zones les plus touchées.
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Pourquoi perdons-nous autant d’espèces ?
La réponse est complexe, mais elle converge vers un coupable principal : l’activité humaine. Pollution, surexploitation des ressources, expansion agricole, urbanisation galopante, braconnage, changement climatique… Tous ces facteurs se combinent pour fragiliser des écosystèmes déjà vulnérables.
Prenons le cas des forêts tropicales. Riches en biodiversité, elles sont rasées à grande vitesse pour laisser place à des plantations industrielles ou à l’exploitation minière. Dans ce processus, les espèces forestières perdent leur habitat, leur nourriture, et deviennent des proies faciles pour les trafiquants.
Le commerce illégal d’animaux sauvages constitue également une menace majeure. Pangolins, éléphants, tigres, mais aussi oiseaux tropicaux ou tortues exotiques sont traqués, vendus et souvent tués. Ce marché noir, qui génère des milliards de dollars chaque année, alimente la disparition d’espèces à un rythme effréné.
Un devoir moral, une urgence écologique
Le message porté par la Journée mondiale des espèces menacées est limpide : nous avons atteint un point de bascule. La disparition d’une espèce n’est pas une anecdote, c’est la perte d’un maillon de la chaîne du vivant. Et lorsque cette chaîne se rompt, c’est l’ensemble de notre équilibre écologique qui vacille.
La nature n’est pas un décor figé ou un simple réservoir de ressources. Elle est vivante, interconnectée, fragile. Le gorille des montagnes ne vit pas isolé sur un mont enneigé : il est lié aux arbres qu’il nourrit, aux sols qu’il fertilise, aux insectes qu’il disperse. En le protégeant, c’est tout un écosystème que nous défendons.
Elie CIRHUZA
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